Paru en 1926, deux ans après le Manifeste du Surréalisme d’André Breton, Capitale de la douleur est une œuvre majeure de la poésie du XXe siècle. Le recueil se veut le manifeste poétique du surréalisme vers lequel Éluard vient de se tourner et dont il va très vitrine devenir l’une des figures emblématiques. En vers comme en prose, Éluard explore l’inconscient du sujet en donnant l’initiative aux mots et à leur libre association, en dehors de toute rationalité et de tout carcan formel. Sa poésie, traversée d’images aussi somptueuses qu’hermétiques, donne une vision toute surréaliste de l’existence qui ne sépare pas le rêve de la réalité. Ces métaphores permettent aussi à Éluard d’exprimer la douleur d’un homme étranger à la société dans laquelle il étouffe. Cette douleur n’est pas seulement celle du Je poétique : elle est la douleur universelle qui se trouve au fondement de chaque existence et qui parle à tout lecteur. À cette douleur primordiale, la poésie d’Éluard répond en jetant les bases d’une vie surréaliste, seule en mesure de sauver l’homme de son désarroi. Ce salut passe par une exaltation de l’amour et de l’être aimé – qui dans le recueil n’est autre que Gala, l’épouse du poète dont il est fougueusement épris. Chant de douleur, d’amour et de révolte, Capitale de la douleur, à presque un siècle de distance, n’a rien perdu de sa beauté et de sa force, à propos de laquelle ses contemporains ne se sont pas mépris.